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Collégiale Notre Dame

La collégiale Notre-Dame d’Espérance

La construction

Elle s’échelonne sur deux siècles et demi (1223-1466). Le fondateur en fut Guy IV, comte de Forez, qui fut soutenu, dans la réalisation de son projet par son oncle Renaud de Forez, archevêque de Lyon qui avait gouverné le Forez pendant la minorité de son neveu. Guy IV décida d’établir à Montbrison une église collégiale – administrée par un chapitre de chanoines – et acquit un terrain sur la rive droite du Vizézy qui faisait alors partie de la paroisse de Moingt. La charte de fondation (1223) prévoyait l’institution de treize chanoines chargés d’administrer la collégiale. A la tête de ce chapitre, nommé par le comte de Forez, était placé un doyen qui devint rapidement le personnage le plus important du clergé forézien.

La construction de l’église commença lorsque furent réglés les problèmes entre le prieur de Savigneux et l’archevêque de Lyon qui voulaient tous deux affirmer leur autorité sur la future collégiale. En 1226 fut scellée une pierre d’honneur, qui se voit toujours au fond de l’abside, pour commémorer le début des offices. On construisit donc assez rapidement le chœur et la première travée de la nef et des collatéraux (1226-1236). Une clôture de bois fut alors placée à l’ouest. En effet, les travaux furent ensuite interrompus longtemps, faute de ressources. Ils ne reprirent qu’au XIVe siècle où furent construites les deuxième, troisième et quatrième travées. Un clocher de bois fut élevé (à l’emplacement de l’actuelle chapelle de la Vierge). La vue de Montbrison du registre d’armes de Guillaume Revel (vers 1450) nous montre ce clocher en bois et Notre-Dame inachevée.

La dernière campagne de construction eut lieu au milieu du XVe siècle (1443-1466), à l’initiative des ducs de Bourbon, successeurs des comtes de Forez. Les cinquième et sixième travées furent alors construites. On acheva aussi les collatéraux. Un jubé fut élevé entre le chœur et la nef. La collégiale Notre-Dame devait avoir deux clochers : seul l’un d’eux fut achevé. Des chapelles latérales furent ajoutées au XVe et XVIe siècle.

L’église est caractérisée par ses grandes dimensions : elle a 77 m. de longueur. La largeur de la façade – clochers et contreforts compris – est de 33,40 m. Le clocher atteint 42,70 m. de hauteur. La hauteur sous les voûtes est de 20 m..

Le plan est basilical, sans transept ni déambulatoire. Il se compose d’une nef centrale et de collatéraux sur lesquels s’ouvrent des chapelles. Le chœur est formé d’une abside pentagonale et d’une travée droite. Le style de l’édifice est très homogène, malgré la durée de la construction (plus de deux siècles).

 

La façade occidentale et le portail (XVe siècle)

La façade occidentale donne une impression de puissance. Les lignes sont sévères : le portail est encadré de deux tours épaulées de gros contreforts. La tour du midi ne dépasse pas la hauteur de la nef. Le clocher nord possède deux étages percés de baies géminées. Son aspect imposant est souligné par les larges contreforts qui garnissent doublement ses arêtes. Les sculptures des fenêtres et des blasons, les cordons-corniches qui partagent sa hauteur, mettent cependant une touche plus délicate. A l’intérieur du clocher, on trouve trois énormes cloches : Sauveterre (1502), Bourbon (1503) et Marie-Thérèse (1820).

Le portail, achevé en 1459, est traité avec une grande richesse qui contraste avec l’austérité de la façade. Il est appliqué en avancée sur celle-ci et encadré de deux contreforts. Cinq voussures en arc d’ogive lui donnent du relief. Le long de ces voussures et des pieds-droits qui leur servent de base, ont été prévus des emplacements destinés à accueillir des statues qui n’ont jamais été placées. Une statue de la Vierge à l’enfant – Notre-Dame d’Espérance – est placée au tympan. Les portes de l’église sont de la fin du XVIIIe (1783) et sont l’œuvre du sculpteur Jean Desbrun. Au-dessus du tympan se trouve une rose, sans remplage, qui est entourée d’une moulure saillante. Elle est surmontée d’un fronton en demi-cercle qui supporte le cadran d’une horloge.

 

L’intérieur de la Collégiale

La nef et ses collatéraux

La nef est formée de six travées. Les voûtes sont à croisées d’ogive et à clefs de voûtes sculptées. Elles reposent sur des piliers à  base polygonale (quatre colonnes et quatre colonnettes engagées). Peu de sculptures, pas de scènes historiées : les chapiteaux sont ornés de fleurs et de feuillages de la région.

La nef est éclairée par des fenêtres hautes situées au-dessus des collatéraux ; elles sont curieusement disposées : un meneau horizontal sépare trois fenêtres hautes, garnies de verrières, de trois fenêtres basses trilobées, aujourd’hui aveugles. La toiture des bas-côtés, appuyée différemment, permettait autrefois à ces fenêtres basses de laisser passer la lumière au lieu d’apparaître aujourd’hui comme un faux triforium.

La nef centrale est flanquée de collatéraux sur lesquels s’ouvrent des chapelles latérales : six sur le collatéral sud, deux sur le collatéral nord. Elles ont été construites entre le XIVe et le XVIe siècle.

 

Le buffet d’orgues et sa tribune

C’est en 1842 que fut inauguré le buffet d’orgues. Il est l’œuvre du facteur d’orgues Callinet, de Rouffach en Alsace (1839). L’instrument a des sonorités puissantes et claires et une grande variété de registres propre à servir la musique romantique. Classé monument historique, il a été restauré en 1981-1982 et a retrouvé ses sonorités originelles ; il repose sur une monumentale tribune de pierre (1842), œuvre de l’architecte Bossan.

 

Les portails latéraux

La nef s’ouvre aussi par deux portails latéraux. Le portail nord est précédé d’un porche (début du XIVe siècle). Il abrite un groupe sculpté (XIXe s.), œuvre de Fabisch. Notre-Dame de Bon-Cœur est encadrée par saint Aubrin, patron de Montbrison, et par saint Claude, évêque de Besançon au VIIe siècle.

Le portail sud n’a été ouvert dans l’ancienne chapelle Saint-André qu’en 1844. Il est surmonté des armes du chapitre de la collégiale dans lesquelles on retrouve le dauphin forézien ainsi que des fleurs de lys qui rappellent le patronage royal.

 

L’abside et le tombeau de Guy IV

L’abside, œuvre de la première moitié du XIIIe siècle, est la partie la plus ancienne de la collégiale. Elle est formée d’un chevet pentagonal et d’une travée de chœur. Elle est éclairée par trois hautes fenêtres à lancette, au-dessus desquelles se trouvent des baies géminées et un quatre-feuilles. Il faut lever la tête vers les voûtes pour apprécier le travail extraordinaire du maître d’œuvre et de ses ouvriers, en particulier pour l’exécution de la voûte du chevet, avec le faisceau des cinq arcs d’ogive qui rejoignent la clef de voûte. Au fond de l’abside se trouve scellée la pierre d’honneur de 1226.

C’est dans l’abside qu’a été placé le tombeau de Guy IV de Forez : mort en 1241 en Italie du Sud, son corps fut ramené en France pour être inhumé dans la collégiale. Le tombeau est surmonté d’un gisant : la tête porte « son bonnet ou barrette de comte ». Il est revêtu d’une longue robe et d’un manteau agrafé par une escarboucle. Il est ceint d’un baudrier auquel sont accrochées une épée, finement ciselée, ainsi qu’une aumônière ; il appuie ses pieds, bottés et éperonnés, sur un lion, symbole de force.

Dans le chœur ont été placées au XIXe siècle des stalles néo-gothiques, réalisées par Bernard, sculpteur sur bois à Lyon, qui évoquent le décor dans lequel devaient se trouver les chanoines de Notre-Dame dans la partie qui leur était réservée.

Le maître-autel (XIXe siècle) est l’œuvre de Bossan. Sa façade antérieure est intéressante par son iconographie : la Vierge portant l’enfant Jésus, le Christ et les pèlerins d’Emmaüs, la mise au tombeau ; saint Jean-Baptiste et saint Jean l’Evangéliste. Sur les côtés de l’autel, les statues de saint André et de saint Aubrin sont tournées vers leurs chapelles respectives.

La croix d’Estiallet (la  croix des saints ») placée près de l’autel, avait été érigée en 1629 pour demander la fin de la peste, dans le faubourg qui lui a donné son nom.

 

Les chapelles latérales

Elles ont été construites, du XIVe au XVIe siècle par des familles nobles ou notables qui voulaient établir leur sépulture. Leur style est celui du gothique flamboyant, avec, pour plusieurs d’entre elles, de remarquables voûtes à liernes et à tiercerons qui ont cinq clefs de voûtes.

 

Les chapelles du collatéral sud

On distingue, en allant du portail vers le chœur, à droite, le long du collatéral sud :

– la chapelle des Morts, construite en 1510 par Eustache de Lévis-Cousan. Cette chapelle abrite aujourd’hui le monument aux morts paroissial de la guerre de 1914-1918, dû au sculpteur stéphanois Lamberton,

– la chapelle Saint-Louis,

– la chapelle de la Vierge, formée en 1842-1845 par la réunion de deux chapelles de la fin du XVe siècle : la chapelle Saint-Antoine du Vieux Clocher (elle est à l’emplacement du premier clocher de la collégiale) et la chapelle Sainte-Catherine et Saint-Roch, édifiée par Louis de La Vernade, doyen du chapitre. En 1842-1845, pour aménager la nouvelle chapelle de la Vierge, on a supprimé le mur qui séparait les deux chapelles primitives. Sur le retable se dressent trois statues du sculpteur lyonnais Fabisch : au centre, la statue dite du Magnificat ; à droite, sainte Catherine, à gauche sainte Cécile.

– L’ancienne chapelle Saint-André, construite en 1506, servit de salle capitulaire. La restauration de l’église, dans les années 1960, a fait apparaître une peinture murale représentant sans doute Catherine d’Alexandrie. Un personnage agenouillé porte le costume des chanoines de Notre-Dame. Une inscription (« Clemens Rose ») indique que le chanoine Clément Roset est enterré ici. :

– La chapelle du Sacré-Cœur (1491) aurait été fondée par Mathieu, bâtard de Bourbon, en expiation du meurtre de Jean Berry, secrétaire du duc de Bourbon. En signe de pénitence, Mathieu de Bourbon demanda à être enterré en face de la chapelle de Berry. Près de son tombeau se trouve aussi celui de Claude de Saint-Marcel qui fut doyen du chapitre des chanoines de la collégiale.

 

Les chapelles du collatéral nord :

– la chapelle dite des Robertet : Jean Robertet, secrétaire de trois ducs de Bourbon et de trois rois de France, qui fit construire cette chapelle en l’honneur de saint Michel. Une inscription témoigne qu’il y fit inhumer plusieurs membres de sa famille. Ses armes apparaissent au-dessus d’une porte ornée de clochetons et d’un arc en accolade.

– la chapelle Sainte-Cécile : fondée en 1510 par Jacques Robertet, chanoine de Notre-Dame, puis évêque d’Albi, mort en 1518. Son cœur y est inhumé sous une dalle marquée d’un écusson, d’un cœur et d’une croix,

– la chapelle Saint-Aubrin : elle fut construite par Pierre du Verney, juge de Forez et chanoine de Notre-Dame. Une partie de la chapelle a été détruite en 1901-1903 et elle a, aujourd’hui, un chevet plat dont l’appareil de pierres est plus récent. Au nord se trouve sous un enfeu formé d’une grande arcade trilobée, le tombeau de Pierre du Verney. Son gisant le représente revêtu des ornements de sous-diacre, les mains jointes en prière. Une grande vitrine abrite reliquaires et statues.

 

Le mobilier et les vitraux

La chaire, très ouvragée (fin XIXe siècle), montre, classiquement, le Christ et les quatre évangélistes. Elle complète le décor néo-gothique formé par la tribune d’orgues et le maître-autel. Les fonts baptismaux sont aussi du XIXe siècle : Jésus est baptisé dans les eaux du Jourdain par saint Jean-Baptiste.

L’église Notre-Dame possède quelques tableaux. Le plus intéressant est placé à l’extrémité ouest du collatéral nord. C’est une mise au tombeau, d’après le tableau peint par Rubens en 1615-1616 et conservé dans l’église Saint-Géry de Cambrai. Cette copie, légèrement modifiée, est attribuée à l’atelier de Gaspard de Crayer (1584-1669) qui était un élève de Rubens.

Tous les vitraux sont du XIXe siècle. Les plus intéressants sont ceux de l’abside dûs à un maître-verrier de Metz, Maréchal, qui est également l’auteur de celui de la seconde travée de la chapelle de la Vierge (1847). Les autres vitraux de cette chapelle, ainsi que celui de la chapelle du Sacré-Cœur, sont l’œuvre de Thévenot, de Clermont-Ferrand (1842). Les vitraux de la chapelle des Morts sont dûs à Alexandre Mauvernay, de Saint-Galmier.

 

Destin de la collégiale

Au cours de son histoire, la collégiale a été dévastée à deux reprises : en 1562, par le baron des Adrets, puis à l’époque révolutionnaire. En 1792, elle fut affectée au casernement d’hommes de troupes et de cavaliers. En 1803, après le Concordat, l’église Notre-Dame, rendue au culte, devint église paroissiale. Les premiers curés concordataires en entreprirent la restauration (vitraux, dallage, orgue, etc.).

Aujourd’hui, la nef apparaît dans toute la splendeur de ses pierres blondes. La collégiale Notre-Dame, dorée par le soleil des lourds étés foréziens ou illuminée par les projecteurs qui soulignent l’harmonie de son architecture, reste le cœur de la cité. Il faut se laisser gagner par la beauté et la sérénité qui émanent de ces pierres, et évoquer le long cortège invisible de ceux qui sont passés ici : de Guy IV visitant les travaux de sa « chapelle » au connétable de Bourbon dans l’éclat de sa puissance ; de François 1er  entré triomphalement dans la capitale du Forez, jusqu’au plus humble de tous ceux qui sont venus, pendant presque huit siècles, chercher  un réconfort ou prier humblement. A Notre-Dame, plus que partout ailleurs dans la ville, on mesure l’épaisseur du temps et le poids d’une histoire que, croyants ou incroyants, nous avons reçue en héritage.

La Croix d’Estiallet

A Montbrison, dans le chœur de la collégiale Notre-Dame, la croix dite d’Estiallet (du nom du lieu-dit où elle se trouvait) passe pour rappeler la peste des années 1629-1632 et avoir été dressée – parmi d’autres signes de dévotion – pour en obtenir la fin.

La peste fut au cours des siècles une épouvantable calamité et, pendant le Moyen Age et sous l’Ancien régime, sévit de façon récurrente. De 1629 à 1632, une terrible épidémie de peste ravage le Forez. Pour demander à Dieu la fin de la peste, les habitants de Montbrison érigèrent une grande croix en pierre, sur la rive du Vizézy, au hameau d’Estiallet, à l’ouest de la ville : c’est la croix d’Estiallet ou croix des saints. Elle était posée sur un socle d’environ un mètre de hauteur. Le long du fût de cette grande croix, six statues de saints – ceux-ci identifiés par leurs attributs traditionnels – sont étagées deux par deux. Ces statues, hautes de 40 cm environ sont sculptées en ronde-bosse et placées sur des culots hémisphériques. En allant du haut vers le bas, selon les identifications faites par Louis Bernard, Thierry Monnier et Alain Sarry, on trouve :

– Saint Jean-Baptiste, vêtu en berger, le visage barbu entouré d’une longue chevelure bouclée qui tombe derrière les épaules, et saint Laurent, tenant un gril, instrument de son supplice.

– Sainte Catherine, tenant une roue, serrée contre elle (l’instrument de son supplice) et une épée (l’épée avec laquelle, après avoir survécu au supplice de la roue, elle aurait été finalement décapitée) et sainte Barbe, tenant une tour (son père, furieux qu’elle se soit convertie au christianisme l’aurait enfermée dans une tour de son château puis aurait incendié la tour).

– Sainte Madeleine, les cheveux dénoués, et saint Pierre, tenant les clefs de l’Eglise que le Christ lui a confiées.

Remarquons que les saints habituellement invoqués contre la peste – saint Roch, saint Sébastien et saint Antoine le Grand – sont absents. Ceux qui ornent la croix étaient sans doute particulièrement invoqués dans la paroisse et sont ici associés aux prières dites pour la fin de l’épidémie.

Ces statues étaient peintes de couleurs vives comme en témoignent encore des traces d’une polychromie. Une première restauration avait eu lieu en 1820. Puis, renversée, menacée de destruction ou de disparition, la croix des saints trouva refuge en 1973 dans le musée de la Diana. Le croisillon manquant – avait-il été cassé ? – a été refait par Louis Bernard, délégué des Monuments historiques, auteur d’un ouvrage sur les croix du Forez, qui était aussi sculpteur. Ce croisillon, qui est donc de création récente, s’inspire des croix du XVIIe siècle ; il présente sur la même face que les six petites statues de saints un christ surmonté d’un titulus avec l’inscription INRI. Sur l’autre face du croisillon figure la Vierge tenant l’enfant Jésus. Les extrémités des bras du croisillon sont potencées et torsadées. Ce nouveau croisillon est un peu surdimensionné par rapport à l’ancien que nous connaissons par une photo de Gabriel Brassart.

En 1982, à l’initiative du père Jacques Court, curé de Notre-Dame, la croix fut installée dans le chœur de la collégiale, à la gauche de l’autel. Elle a ainsi retrouvé une visibilité et un rôle dignes de son histoire.

Crédits et remerciements

Ce parcours du patrimoine de la ville de Montbrison est le fruit d’une collaboration entre les services de la ville, les associations patrimoniales : Amis des Thermes, de Sainte Eugénie, Amis de la colline du calvaire, Pays d’Art et d’Histoire, des passionnés d’histoire de Village en Forez, sous la coordination de Jeanine Paloulian adjointe au patrimoine. Remerciements particuliers à l’office du tourisme Loire Forez, Pierre Drevet, Michèle Bouteille, Mme Brunet qui ont contribué à l’écriture.

Photos : Ville de Montbrison, Dronereporter42, Archipat, Archives municipales (fonds Fayard) Loire Forez agglomération, Aquarelle Jean-Claude Golvin.